Une profession dangereuse : être avocat dans le Caucase du Nord

Amnesty International communique :

Les avocats sont souvent la dernière ligne de défense des personnes confrontées à la torture et aux procès iniques dans le Caucase du Nord et dans le reste de la Russie, mais sont eux aussi fréquemment la cible d’attaques en relation avec leur travail, écrit Amnesty International dans un rapport publié jeudi 21 mars 2013. Ce document traite du harcèlement que subissent les avocats pénalistes dans le Caucase du Nord, région de la Fédération de Russie où la violence des groupes armés et la réponse brutale des autorités ne tiennent guère compte du respect pour les droits élémentaires de l’être humain.

« Les avocats russes ont le devoir de protéger les droits de leurs clients face à la justice pénale chargée de prononcer des condamnations. En s’acquittant de leur devoir envers leurs clients, ils s’exposent fréquemment à des risques considérables pour eux-mêmes », a déclaré John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

La torture est fréquemment utilisée en Russie en vue d’obtenir des « aveux ». Les avocats qui tentent de dissuader leurs clients de s’avouer coupables et contestent les violations des droits de leurs clients sont perçus comme des obstacles à la bonne marche de la justice, plutôt que comme des garants incontournables de son bon fonctionnement.

« Hélas, les avocats dans le Caucase du Nord qui luttent pour les droits de leurs clients sont souvent en butte à l’intimidation, aux menaces, parfois aux violences physiques, pouvant aller jusqu’à la mort, tandis que les responsables de l’application des lois qui sont derrière ces attaques jouissent de l’impunité. »

Dans ce contexte, les avocats ont un rôle essentiel à jouer, en tant que représentants des victimes d’atteintes aux droits humains et garants de l’équité des procès pour les personnes accusées d’appartenir à des groupes armés ou de se livrer à des activités criminelles.

« Pour le détenu, l’avocat est souvent le seul contact avec le monde extérieur qui puisse attester qu’il a subi des actes de torture et tenter de faire valoir ses droits, a commenté John Dalhuisen.

Ces avocats qui affrontent le cercle de l’injustice dans le Caucase du Nord en deviennent bien souvent les victimes.

Le rapport publié le 21 mars présente une série de cas dans lesquels les avocats ont subi des mauvais traitements ; dans l’un de ces cas, l’avocat est mort.

En 2010, Sapiat Magomedova, avocate au Daghestan, a été frappée par des policiers alors qu’elle se rendait au poste pour voir son client. Après avoir porté plainte et insisté pour que ces faits fassent l’objet d’une enquête impartiale, elle a elle-même été inculpée de charges pénales.

En décembre 2011, un avocat de Naltchik a été grièvement blessé dans un accident de la circulation douteux qui impliquait des policiers.  Il a reçu des menaces de mort avant comme après cet accident, sur lequel la police n’a pas enquêté.

L’avocat Omar Saïdmagomedov et son cousin ont été tués par des membres des forces de sécurité le 20 janvier 2012 dans une rue de Makhachkala, au Daghestan. Les autorités ont affirmé avoir tué deux membres d’un groupe armé. Toutefois, les confrères d’Omar Saïdmagomedov affirment qu’il s’agit d’une exécution extrajudiciaire ; ils sont eux-mêmes victimes de harcèlement en lien avec les efforts qu’ils déploient pour découvrir la vérité.  « Les avocats qui représentent les victimes de violations des droits humains imputables aux agents de la force publique sont confrontés au même problème que leurs clients : l’absence de recours judiciaires efficaces qui leur permettraient de voir les responsables identifiés et traduits en justice, a indiqué John Dalhuisen.

« Force est de constater que le fait d’exercer la profession d’avocat et de connaître la loi n’est pas un avantage significatif lorsque de puissants représentants de la sécurité sont impliqués.  L’impunité pour les violations des droits humains reste la règle. « Les autorités russes doivent veiller à ce que les avocats soient protégés et libres de s’acquitter sans crainte de leurs activités professionnelles. Elles doivent traduire en justice tous les auteurs présumés de violences et d’atteintes aux droits humains visant les avocats. Enfin, elles doivent faire en sorte qu’ils soient en mesure de défendre leurs clients sans entrave. »

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